dimanche 11 mars 2012

Essai d'éthique - Partie IV : L'association comme seconde dissociation.


Notre présentation du mouvement (volonté) de dissociation au sein même du vivant présente sa propre critique puisqu'elle expose son nihilisme inconscient. Nous tenterons ici de dépasser cet état de fait.


La première possibilité qui saute à mon esprit est celle d'un mouvement qui lui serait contraire. Cependant, simplement cerner le concept qui réfère au mouvement contraire à la dissociation est une entreprise périlleuse. En effet, avons-nous seulement un mot englobant l'idée? Le mouvement contraire pourrait se traduire ainsi : plus que la seule reconnaissance de la co-existence et la conscience de l'ensemble, ce mouvement serait un élan d'association de l'individu au tout (de la partie au tout)...


Le contraire de la dissociation serait un mouvement d'unification (ou d'association), une pulsion à l'accord et au retour à la source, un retour à l'origine. Il ne faut pas s'étonner si le champ lexical rejoint celui du mysticisme. Les mystiques parmi les philosophes enseignent justement un monisme, même s'il n'est pas matérialiste. La seule réalité qu'ils reconnaissent est celle de la divinité, celle de l'esprit. Des méditations sur les Sermons d'Eckhart ou même l'Éthique de Spinoza sont plus qu'éclairants.


Cependant, le mystique apparaît parmi les vivants comme celui se délaissant le plus de la valeur de sa vie, qu'il dédie à une cause supérieure (il mène une existence fondamentalement éthique). On peut y voir avec raison la négation, ou le refus, d'un état de fait qu'il cherche à dépasser. En un sens, on peut le voir à son tour en dissociation ; ne vie-t-il pas en isolation, en ascèse justement?


De plus, loin du mystique qui sacrifie sa vie pour une esthétique ontologique, le mouvement d'association ou d'unification peut être simplement vu comme toute tendance à l'uniformité au sein d'une société, auquel cas le « tout » n'est plus tant « la totalité de la réalité » mais « l'ensemble de la réalité sociale » de l'individu. N'est-ce pas d'ailleurs ce qu'impose la pression sociale? Ce mouvement ne serait alors qu'une suppression de la volonté d'individuation, qui se réalise justement par dissociation... Mais alors que le mystique se pose comme idéal éthique d'abnégation de l'individu dans le « tout cosmique », la volonté d'association commune, celle induite par la pression même de la société, se pose comme une éthique minimale, une éthique de conformité qui n'est aucunement synonyme de lucidité. 


Quoi qu'il en soit, cette volonté d'association, qu'elle soit seulement socialisante ou mystique, bien qu'elle nous présente une autre possibilité du vivant, une possibilité déjà plus éthique, demeure toutefois un mouvement d'opposition : il nous apparaît encore en réaction. Son élan d'association ou d'unification se fait en dissociation de son ego ; malgré tout, il demeure un élan (pulsion, volonté) qu'on peut critiquer comme étant un simple détournement de l'élan vital, la dissociation...


Pourra-t-on finalement échapper à la dissociation? Ce sera notre défi.

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