dimanche 20 novembre 2011

Support aux Indignés : de l'utilité et de l'argent (citation du jour).

« L'utilité principale que nous tirons des choses extérieures, en dehors de l'expérience et de la connaissance que nous en acquérons en les observant et en les transformant, est la conservation du Corps ; c'est pourquoi les choses les plus utiles sont celles qui peuvent alimenter et nourrir celui-ci de telle sorte que soutes ses parties soient capables de remplir correctement leur fonction. [...]


Pour se procurer ces biens, les forces de chacun seraient à peine suffisantes, si les hommes ne s'apportaient une aide réciproque. L'argent est devenu le condensé de tous les biens, et c'est pourquoi d'habitude son image occupe entièrement l'Esprit du vulgaire, puisqu'on n'imagine plus guère aucune espèce de Joie qui ne soit accompagnée de l'idée de l'argent comme cause.


Mais cela n'est un vice que chez ceux qui recherchent l'argent, non par besoin ou nécessité, mais parce qu'ils ont appris les techniques de l'enrichissement et se glorifient de les posséder. Ils nourrissent bien leur Corps selon la coutume, mais avec parcimonie parce qu'ils croient perdre toutes les richesses qu'ils consacrent à la conservation du Corps. Mais ils vivent contents de peu, ceux qui connaissent l'usage vrai de l'argent et gèrent leur richesse en fonction de leur seul besoin. »


Pour bien saisir le propos de Spinoza (Éthique, IV, Chapitres XXVII-XXIX), il faut avoir en tête (!) que l'intelligence est la fonction essentiellement humaine, mais est aussi une fonction biologique.

On ne peut bien développer notre intelligence qu'en alimentant correctement notre corps, selon une alimentation variée. Mais pour nous permettre une alimentation variée, l'aide est nécessaire au niveau de la production. Que serions-nous sans le travail conjoint des producteurs, ou si nous n'avions développé que la production d'un seul aliment?

Afin de régler nos échanges, l'argent s'avère une mesure bien utile. Elle est même devenue la mesure de tous nos biens. C'est pourquoi on en vient à associer l'argent au bien, ou toute joie que peut nous procurer ces biens. On ne désire plus tant de bons aliments, mais de l'argent...

On peut bien sûr se contenter des biens premiers : ceux dont nous avons nécessairement besoin. Ce n'est cependant pas le lot de tous. On voit se répandre dans toutes les sociétés ce vice dont parle Spinoza (XVIIe Siècle) et qui consiste à rechercher la richesse non par nécessité mais pour elle-même (comme élément de Puissance), d'où la grande valeur donnée aux techniques d'enrichissement (exploitation). Nous en sommes désormais venus à élire nos gouvernements selon cette valeur, au grand malheur des exploités.

Reprenons l'analogie de tout temps utile entre l'État et le Corps pour comprendre le drame des sociétés techno-économiques actuelles. Menées par l'intérêt économique, désirant tellement l'argent en lui-même (profit), tous sont convaincus (par une erreur bien grave) que toute richesse dépensée dans la conservation du Corps - la population - est perdue ; ils mettent donc en place des mesures de parcimonie (« austérité »). Mais comment le Corps peut-il se maintenir en santé et assurer le développement de ses capacités si on le sacrifie pour une cause plus noble : l'enrichissement de l'« État »?

Malheureusement pour le Corps, cela se traduit ainsi : il doit cesser de croître (contrôle de population), s'il ne veut pas croître sous-alimenté. Une croissance sous-alimentée se traduit par de nombreux défauts quant à ses capacités, dont la première et plus importante est la conduite de celle-ci par la Raison (devoir civique et moral fondamental). N'est-il pas soumis alors à ses Besoins, enchaîné comme un esclave?

Qu'enrichit l'État recherchant l'argent par fierté? Certes, ce n'est pas son Corps, ne lui « consacrant » que le moins possible? En fait, qu'une partie de celui-ci semble bénéficier de la richesse : sa Tête. Cependant, ce n'est pas toutes les activités de celle-ci qui sont justement alimentées : son Intellect en souffre énormément (toute l'institution de l'éducation, celle de la science et de la recherche, celle des arts, etc.) puisque c'est une autre partie qui bénéficie du fruit de la coopération. Cette partie est celle dominée par ceux « qui recherchent l'argent, non par besoin ou nécessité, mais parce qu'ils ont appris les techniques de l'enrichissement et se glorifient de les posséder ».


Voilà bien le mal de notre temps : le vice économique, la fierté monétaire. Les États servent et alimentent les techniques de l'enrichissement, pour l'enrichissement. Ils créent cette classe d'humains viciés au nom de cet intérêt supérieur.

Mais en réalité, ces États, et leur Corps, s'appauvrissent artificiellement pour maintenir cet intérêt, ce Besoin, artificiel (imaginaire). Je ne dis pas que l'économie ne soit pas utile ou ne soit pas un besoin pour les États ; tout au contraire : l'utilité de l'économie, sa valeur, tient essentiellement dans la compréhension des besoins réels des populations afin d'entreprendre la coopération nécessaire pour alimenter ceux-ci. L'interdépendance n'est pas un mal si elle sert l'émancipation de ce qu'il y a de mieux dans l'humain. Malheureusement, en misant sur une économie fondée sur le profit (vice de l'argent), on se coupe à toute coopération réelle puisqu'elle devient conditionnelle à un profit éventuel (exploitation de marché). C'est ce qui explique à la fois les sommes exorbitantes détournées dans la spéculation des marchés, les sacrifices offerts à une classe de saints (de la Fortune) spécialistes ou parvenus, et ce qui est sacrifié : la vie du corps social. Ce corps social, au finir, ne doit pas seulement vivre (ou survivre), mais vivre bien, d'où l'attente raisonnable et légitime de TOUS, pour TOUS.


Nous sommes loin d'États qui valorisent « l'usage vrai de l'argent et gèrent leur richesse en fonction de leur seul besoin », reconnaissant la nécessité d'un Corps sain, pour un Esprit sain. Du moins, ce n'est pas cette décision que nos « élites » valorisent à nos dépends. Voilà donc pourquoi le Corps doit légitimement crier ses vrais besoins à sa Tête qui lui est sourde, et qui s'enfle sur son pouvoir de créer de la richesse à partir de rien...

Aux prochaines élections, assurez-vous d'élire des représentants qui ne sont pas sourds ; bref, ne votez-pas aveuglément, pour l'« économie » qu'on vous sert depuis tant d'années. Manifestez-vous car sans vous, le vote devient un geste économique : chacun y cherche son profit.

mercredi 16 novembre 2011

Peut-on se passer de religion?

La religion est une institution (politique) d'éducation morale.

Cette définition nous permet de mieux saisir les enjeux qui la concerne. Affirmer qu'on puisse se passer de religion, c'est en quelque sorte affirmer qu'on puisse se passer d'éducation morale. Cette thèse suit deux principes. Premièrement, que l'éducation morale puisse être dirrigée par une autorité morale, ce qui implique la reconnaissance d'une telle autorité. Deuxièmement, que la moralité suit un certain idéal.

Toute religion est dépositaire d'un idéal moral qu'elle pose en absolu dans une relation avec le divin (l'idée de cet idéal). En tant qu'institution, elle se donne un rôle éminemment pédagogique, ce qui suit une vision hégémonique (répendre le bien). Mais l'éducation suit l'humain toute sa vie, dans toutes ses facettes. Elle oriente donc la saisie de l'expérience en vertu de l'idéal qu'elle véhicule. C'est pourquoi elle tend à l'intégrisme : elle veut maintenir l'intégrité morale du tout (social) et de ses parties (individus). Cependant, le but de l'éducation étant de transmettre une réalité conçue comme fondamentale à l'humain, l'éducation morale réussit lorsque l'individu porte en lui la moralité. Ainsi, l'éducation religieuse réussit lorsque les individus portent en eux une moralité, justifiée dans une foi dans l'idée de l'idéal, le divin. Le croyant est celui qui a foi dans l'idéal, puisque celui-ci n'est pas ; il doit être. Le moral s'impose donc au réel.

L'institution religieuse cherche donc à subsumer le réel au moral (divin). Le réel sera donc interprété en fonction non pas de lui-même, mais en fonction des vérités morales, les seules qui importent. [Nous voyons ce même système dans les écoles philosophiques dogmatiques : voir le stoïcisme et l'épicurisme.] Le Credo est la conception du monde découlant de la vérité morale révélée. Le Credo sert à confirmer la vérité révélée, rassurant les individus dans leur foi morale. Malheureusement, elle finit par dire que la réalité est telle qu'elle doit être car soumise à la volonté du dieu. C'est bien triste car, même s'il est vrai que la moralité et que l'idéal aient plus de valeur que l'être seul, cet être conserve cependant sa propre valeur qu'il faut savoir reconnaître en soi et non en un autre (autorité intellectuelle et morale). Ainsi, l'éducation morale est indissociable d'une lucidité, qui est la vertu intellectuelle du jugement. La moralité doit s'imposer dans notre volonté (coeur) plus que dans notre intelligence. Celle-ci doit faire face à une réalité (la nature) qui impose sa forme, à notre peur et désespoir. En cherchant à rassurer, le dogme nous réduit à des « animaux » (volonté = coeur = désir = animal - cf. Aristote).

Peut-on donc se passer de religion? La religion élève pourtant l'enfant à l'adulte. Elle échoue seulement dans son obstination à imposer l'intégrité de la nature à la morale. Elle ne doit pas chercher réponse à tout mais laisser place et cultiver les questions qu'elle soulève : ces questions sont ce qui font passer l'humain de l'enfance à l'adulte ouvert et lucide. Sa finalité est donc la vie philosophique.

Se passer de religion sera cependant le but des sophistes : que l'humain soit la mesure de toutes choses. L'important étant le politique, le moral s'y soumet. Il n'y a pas de morale absolue, seulement convenue et voulue. Pour le sophiste, toute moralité, toute valeur, doit laisser place à la discussion. La morale n'est humaine que lorsqu'elle est discutée et convenue par des humains, non quand elle se révèle (quand elle révèle un idéal) comme elle s'impose à l'enfant. Misant sur l'autonomie humaine, le sophiste veut l'humain seul maître de ses valeurs.

La philosophie seule permet de rejoindre la sophistique et la religion : la réflexion permet de dépasser la convention en reconnaissant la valeur réelle et véritable d'un idéal moral absolu et nécessaire, laissant l'adulte libre et autonome (responsable) de sa moralité, sans excuse politique.

Peut-on se passer de piété?

Je soulève cette question aux détracteurs de la religion. La piété est la réelle valeur cultivée par l'éducation religieuse. Elle consiste dans la foi en un idéal moral supérieur et absolu, donc universel. C'est bien une de ces vertus qui enveloppe toutes les autres car le respect de l'idéal est nécessaire pour toute intégrité morale. Il n'y aurait donc aucune vie morale sans piété. Autant l'idéal impose son autorité sur notre moralité, autant la loi, voix de la justice, impose son autorité légitime au citoyen vertueux. Veut-on se passer de citoyens respectueux des autorités légitimes?

Les sophistes supportent mal toute autorité non humaine : elle doit être à notre hauteur pour la mener là où nous la voulons, qu'elle serve la voix de l'humain et non celle de la justice. L'autorité, selon les sophistes, est bien arbitraire. Notre démocratie libérale relativiste est un projet sophistique voyant le jeu des intérêts prédominer le souci de moralité dans toutes les sphères d'action. Ne voyons-nous pas comme un bien moderne la moralité retranchée dans la sphère privée, lieu sans valeur sociale, sans discussion publique?

Voulons-nous d'un monde, d'une politique arbitraire imposant la convention comme principe de légitimité? Nous voilà face au danger fondamental de toute société, qu'elle soit démocratique ou non. Telle est la force du politique qui s'impose sur la morale, et sur la religion. Notre société cultive les sophistes, mais combien de religieux sont des sophistes? N'oublions jamais que la religion demeure une institution politique. Sans philosophie, nous demeurerons dans ces conflits d'intérêts. Voilà notre barbarie bien contemporaine!

Éternel retour du même... encore l'Apeiron.

Je suis mauvais pour donner des titres. Je suis mauvais pour exprimer clairement une idée. J'en appelle donc au maître et cite sa pensée qui engendra la mienne voilà quelque temps déjà.

Voici Nietzsche, parlant d'Anaximandre dans La naissance de la philosophie à l'âge tragique des grecs (selon l'édition) :

« Jamais un être qui possède des qualités définies ne saurait être l'origine et le principe des choses. »
« L'être vrai, conclut Anaximandre, ne peut posséder de qualités définies, sans quoi il serait né et devrait périr comme toutes les autres choses. Pour que le devenir ne s'arrête jamais, il faut que l'être originel soit indéfini. [...] C'est pourquoi son nom est l'Indéfini (Apeiron). »
« Sans doute ce sein maternel de toute chose ne peut être désigné par l'homme que de façon négative ; c'est l'être auquel on ne peut donner aucun prédicat tiré du monde du devenir. »
« Le devenir éternel ne peut avoir son origine que dans l'être éternel. »

J'espère que ces mots éclairent l'idée-titre de mon blogue et compensent mon défaut de luminosité naturelle. Mais voilà, la suite et finale de sa lecture d'Anaximandre ouvre la pensée et la réflexion vers l'étendue offerte à l'entendement, et la limite de toute entreprise savante...

« Anaximandre en est resté là, c'est-à-dire qu'il est resté dans les ténèbres profondes qui couvraient comme des fantômes gigantesques la cime d'une contemplation de l'univers. Plus on a voulu serrer de près ce problème, en se demandant comment le défini a jamais pu sortir de l'Infini, le temporel de l'éternel, plus la nuit est devenue dense. »

Les ténèbres profondes, fantômes gigantesques, couvrant le sommet de la contemplation de l'univers... Contemplation de l'univers limitée par notre vision... On pressent la cime nécessaire mais ne pouvons la saisir. Les ténèbres profondes nous renvoient au-delà de nos sens.

Ténèbres profondes, fantômes gigantesques... Sommes-nous dans la caverne? Il n'y a aucune lumière, aucune possibilité de vision. La caverne débouche sur une autre caverne... Avons-nous pris le mauvais passage, celui qui s'enfonce dans l'obscurité, dans l'abîme de la matière?

Ténèbres profondes, fantômes gigantesques : l'être apparent, constamment en devenir... Telle semble être la réalité de cette vision.

Cime ou abîme? N'est-ce qu'une question de perspective?

Que dirait Zarathoustra? N'eut-il pas la Vision, celle du poids le plus lourd? Pour l'homme supérieur, la Vision est possibilité de rédemption : elle rend possible le Surhomme.

Zarathoustra suit les pas d'Anaximandre, parcourt le chemin qui mène nulle part. « Nulle Part », n'est-ce pas l'ultime constatation de l'entendement qui contemple la Nature? « Nulle Part », n'est-ce pas la Réalité Ténébreuse qui lui apparaît dans toute sa Lumière? « Nulle Part », la seule Vérité Nécessaire.

Spinoza aurait donc suivi le même chemin, et vu la lumière là où les esprits supérieurs y voyaient des ténèbres. Nu fut-il pas (in)justement poursuivi, pourchassé, persécuté, pour avoir ainsi osé défier la caverne, y renversant l'ordre convenu? Spinoza, le sage clamant l'ultime et absolue « Nulle Part » : l'Unité.

Ne faisons-nous que l'éloge de la Nuit? Serrant dans nos bras « la Nuit la plus Dense » comme Zarathoustra serre dans ses bras « le Poids le plus Lourd », « l'Éternel Retour », pour le mordre à pleines dents, arrachant ainsi la tête du serpent, se libérant du fardeau, nous plongeons dans la Nuit la plus Dense pour y exercer notre conscience, pour en ressortir... l'esprit reposé et le regard perçant.

Prenons-donc cette leçon d'éthique : vivons sans peur, ni espoir, en toute lucidité. C'est la seule voie possible de Bonheur (béatitude, félicité).

Ô toi qui ose toucher au mystère, tu seras sacrifié pour ta lucidité. Tu porteras le fardeau de la Philosophie... le poids le plus lourd et le plus léger.

... « et, si quelqu'un essayait de les délier et de les conduire en haut, et qu'ils pussent le tenir en leurs mains et le tuer, ne le tueraient-ils pas ? - Ils le tueraient certainement. »
Platon, La République, VII, 517a (trad. Chambry)
Amen, mon cher Glaucon.

jeudi 10 novembre 2011

Crise de l'endettement.

Un autre essai d'analyse d'un problème économique plus global : la crise de l'endettement. J'essaie de discuter des arguments qui s'objectent à la pensée d'une économie qui sort de ce cercle vicieux économique.


Définition :
L'endettement est la « création » présente de richesse aux dépends d'une économie future.

Critique :
L'explosion de l'endettement induit une idée fausse de la croissance économique puisqu'il n'y a pas réelle croissance dans le temps : il n'y a aucune croissance de richesse réelle mais plutôt une croissance de richesse fictive, spéculative (possible). Ce n'est pas une solution puisqu'elle n'est que le report du problème vers le futur.

Est-ce le constat de notre incapacité à créer un ordre socio-économique adéquat et juste?

DISCUSSION

Première objection :
L'« absence de solution ». Il n'y aurait aucun autre moyen encore trouvé de maintenir notre manière actuelle de vivre. C'est donc un mal temporaire.

Réponse :
L'argument n'est que l'affirmation d'un défaut de compréhension, d'imagination et de volonté. De fait, un défaut de compréhension implique un défaut de connaissance des causes du problème, et sans cette connaissance, l'action, manifestant une volonté de changer la situation, n'a pas de fondement concret. Nous repoussons donc la prise de solution en reportant le problème.
La réalité, c'est que la situation ne change pas, nous demeurons dans un statut-quo. Le « système » économique en place poursuit sa recherche de cohérence, même si cette cohérence se fonde sur une injustice fondamentale. On devrait parler de « rationalisation » d'une manière psychologique.

Deuxième objection :
L'« impossibilité d'une solution ».

Réponse :
L'argument n'est que l'affirmation d'un défaut de compréhension, d'imagination et de volonté. L'absence de compréhension devient paresse intellectuelle : son fondement est un sophisme de réduction naturaliste. On finit par affirmer que la situation est ce qu'elle doit être, est nécessaire. Le problème n'est plus seulement considéré comme temporaire, mais nécessaire. Elle devient un paradigme économique et politique.

Troisième objection :
Le fardeau économique incombe à l'intérêt privé selon un « choix de valeur » ; le sacrifice témoigne de l'affirmation de la valeur. L'endettement offre la liberté à l'individu d'exprimer économiquement ses valeurs. C'est donc une mesure légitime.

Réponse :
L'endettement est une bonification présente pour un sacrifice futur. Le besoin étant senti comme un mal, on cherche à éviter ce mal au temps présent (chez ceux qui sont en situation difficile, par exemple les étudiants non encore professionnellement autonomes). Pour les étudiants, ils devront sacrifier leur autonomie future par l'endettement, aux premiers temps de leur autonomie économique professionnelle. de manière générale, l'endetté se place en situation de besoin anticipé. Leur qualité de vie dépend alors de l'endettement. L'émancipation de cette condition dépendante nécessite un certain seuil économique qui est espéré. Cependant, le futur échappe à notre prévoyance ; nous sommes laissés à une situation présente constante soumise à la fortune (littéralement), d'où la limite à la spéculation sur notre fortune future. Ceci montre l'insuffisance de l'endettement comme solution rationnelle à des problèmes fondamentaux.

Cependant, c'est de manière bien raisonnable que nous entreprenons de nous endetter, selon l'objection en question. L'endettement raisonnable vise la réalisation de nos valeurs essentielles, dignes du sacrifice futur : une qualité de vie raisonnable.

Malheureusement, l'endettement associe la qualité de vie raisonnable à une qualité de vie excessive puisque ce sera l'excès qui remboursera la dette. Autrement, ce sera un manque à cette qualité de vie raisonnable ; elle devient donc déraisonnable. Nous envisageons alors l'« excès raisonnable », ce qui est contradictoire, l'excès étant déraisonnable. C'est donc un piège moral. Cependant, on y survit par nécessité.

L'« excès raisonnable » nous semble un bien économique, forçant l'intérêt de l'endetté vers la performance économique. Cette performance est habituellement calculée en terme de salaire. Or, ce qui est sacrifié doit être une partie du salaire, celle excédant le minimum requis pour maintenir la « qualité de vie raisonnable ». Nommons cet excès le profit, celle associée à une « qualité de vie excessive ». On parle donc de « plans d'austérité » dans l'optique du sacrifice (idéalement, seulement des excès). Pourtant, ce sacrifice doit être équitable, donc ne pas faire descendre la qualité de vie sous le seul du juste milieu (entre le manque et l'excès). Que sacrifions-nous lorsque nous n'avons pas d'excès?

Ceux qui disposent de cet excès pourront rembourser plus rapidement leurs dettes. Se pose alors la question de l'après-dette. À ce moment, la réalité de l'excès se fait sentir. Cet excès, la société doit le taxer afin de l'investir dans une structure qui assure l'indépendance de la qualité de vie raisonnable à l'endettement. C'est ainsi qu'on peut se sortir socialement de la spirale de l'endettement.

Cependant, des intérêts privés profitent de cet endettement. Prenons à témoin la société de consommation. Disons, de manière plutôt générale, que l'emprunteur se place en situation de dépendance face à l'emprunteur (quoique ce dernier dépend du remboursement). C'est une situation de minorité qui est avantageuse pour les intérêts privés qui profitent de cette situation (les banques). Les intérêts privés finissent par contrer l'émergence de l'autonomie (économique, mais c'est le cas de toute autonomie : voir Kant, Qu'est-ce que les Lumières?) au nom de leur autonomie. C'est un faux libéralisme que ce néolibéralisme.

Conclusion :
Somme toute, le problème se trouve donc dans la dépendance des intérêts à l'excès. Si le manque est clairement perçu comme un mal, l'excès est vu comme un bien. C'est une erreur. L'excès est un bien qui profite d'un mal. Le bien réel se trouve dans le juste milieu de l'intérêt. L'excès doit être réinvesti socialement pour augmenter la qualité de vie générale, créer les conditions d'émancipation des individus formant la société.

La crise de l'endettement vient de la valorisation de l'endettement comme solution présente à un problème présent. Cependant, ce n'est pas une solution puisqu'elle ne règle pas le problème présent, elle le repousse. C'est donc une fausse solution : le problème futur sera réglé en temps et lieu, selon l'endettement qui lui convient. Il n'y a pas réelle économie ; c'est une économie fictive, fausse, imaginative, spéculative.

L'économie réelle progresse plus lentement, quoique sûrement. Néanmoins, elle seule permet un réel progrès. L'obsession du progrès est la cause de toute cette fiction artificielle et spéculative. C'est une idée confuse ayant pris tant de place dans les esprits qu'elle les maintient dans un état de rêve éveillé. La fin du rêve risque de créer beaucoup de douleurs.

Ouverture :
On parle beaucoup de l'endettement comme un investissement, il faudrait donc bien saisir cette idée fondamentale à l'économie et au progrès réel pour nous assurer qu'elle n'est pas pervertie par quelque idéologie économique frauduleuse. Parlons donc d'investissement individuel, et d'investissement social.

Aide communautaire et travail social


Présentation :
Voici un essai-analyse d'une idée-solution dans le domaine politique-économique : un « système (institution) d'aide communautaire ».

Thèse :
L'aide communautaire ne peut être d'intérêt privé ; c'est fondamentalement (nécessairement) d'intérêt public.

Solution :
Il faudrait alors INVESTIR socialement dans l'aide communautaire.
L'investissement doit servir à la création d'EMPLOI.
L'emploi est la reconnaissance économique d'un TRAVAIL.
Le travail est un investissement individuel dans le SOCIAL.

Enjeux :
Ce travail social pourrait être l'emploi par excellence des étudiants, sorte de stages sociaux pouvant être associés aux domaines d'études supérieures (techniques - cégep préuniversitaire - université). - Est-ce que cela peut aider à la subvention des études, voire permettre la gratuité scolaire? ou cela ne fait que déplacer le problème de l'endettement?
Ce travail social pourrait aussi être l'emploi par excellence pour toute réintégration sociale ou inclusion sociale, mesure essentielle pour l'aide à l'itinérance.

DISCUSSION

Problème :
Cet investissement social doit être FORCÉ par une imposition indexée selon la CAPACITÉ à investir, ce qui va à l'encontre des intérêts individuels et privés. C'est un sacrifice imposé à certains, qui semble injuste. C'est une mesure qui va à l'encontre d'une certaine liberté individuelle (privée) au nom d'une égalité sociale (publique). La valeur de la société semble dépasser la valeur de l'individu, chose contraire à l'esprit du LIBÉRALISME.

Réponse :
C'est une mesure légitime puisque juste : elle combat et corrige une iniquité sociale naturelle. C'est la définition même de la JUSTICE SOCIALE. C'est la « tâche » attendue de la société : elle est nécessaire selon l'idée même de la société. Elle est même fondamentalement attendue selon l'esprit du libéralisme : la société au service de l'individu. La correction d'une iniquité naturelle ou circonstancielle est un service rendu à l'individu et la société.

Conclusion :
La justice sociale n'est pas contraire à l'idée du libéralisme, mais à l'idée fausse du libéralisme qu'on appelle aussi néo-libéralisme. Celle-ci pose comme absolu l'intérêt individuel, privé, et pose comme contingence la société et la relation entre celle-ci et l'individu. Pourtant, la société est le milieu naturel (écosystème) des individus.
Le néolibéralisme est une idée fausse car souffre d'une confusion : elle se fonde sur une réduction naturaliste (sophisme). La société (milieu naturel, écosystème) est ce qu'elle doit être (une condition subie), il faut donc l'accepter comme telle ; notre seul pouvoir d'action réside dans l'action et l'émancipation de l'individu (liberté) ; dans un tel monde, « l'homme est un loup pour l'homme » : une compétition pour l'émancipation et la libération ; celle-ci n'est possible que par la domination du milieu et les compétiteurs font partie de ce milieu.
Notons en passant que cette conception « naturaliste » de la réalité se méprend sur l'idée même de Nature fondée sur une représentation faussée de l'évolution naturelle. Elle réduit l'idée d'Évolution à la compétition alors que la coopération et l'adaptation font partie intégrante de celle-ci. Ce « réalisme » est une fausse lucidité, n'apportant l'attention que sur un « mal » pour le justifier de manière naturelle, le posant comme une loi. Surpasser le « mal » par l'acceptation et non la modification des conditions ou causes de ce mal.
De fait, la justice est une entreprise contre-nature : elle est le fruit d'une réflexion lucide sur la réalité afin de corriger artificiellement un « mal » au nom de l'idée qui se trouve par-delà bien et mal et qui comprend la cause, donc la vraie réalité.

Ouverture :
Revoir la distinction et la compréhension entre « privé » et « public », au niveau de l'intérêt.
Quelle science pouvons-nous avoir de l'intérêt? Comment dépasser l'intérêt?


Voir peut-être Nietzsche, Par-delà bien et mal.

Endettement - éducation

En cette journée de manifestation des étudiants contre la hausse des « droits de scolarité », j'entreprends une analyse du problème selon une perspective philosophique. Désolé du caractère brouillon et de la dureté de la présentation qui suit une méthode réflexive en évolution.


Problème :
La question est de savoir qui doit prendre sur ses épaules l'endettement de certaines institutions, système ou entreprise. Le problème particulier qui nous intéresse est celui du l'endettement étudiant.

Les étudiants doivent-ils s'endetter pour éviter l'endettement du système universitaire (éducation supérieure)?

Projet :
Critique de l'endettement comme solution économique (à venir).
Critique du choix social de donner le fardeau économique public au privé.
Critique du choix de donner le fardeau économique de l'éducation publique aux étudiants.
Critique de la qualité publique ou privée de l'institution scolaire supérieure.

Préliminaire :
Notons que le discours parle de « droits de scolarité » conçus comme frais.
Le « droit » est associé à un « frais ».
Le « droit » devient soumis à la capacité de payer.

Analyse :
La capacité de payer des étudiants est inégale : certains sont supportés par une famille, certains supportent une famille.
La qualité de vie des étudiants varie de ses dépendances : elles peuvent être sociales et économiques. On juge que la qualité des études bénéficiera d'une réduction des dépendances économiques. Ce jugement est vrai si et seulement si l'étude bénéficie de cette réduction de dépendance, et non le divertissement.

La capacité de payer des travailleurs est inégale : certains (hautement minoritaires) auront un emploi avec un salaire assurant cette capacité de payer sans modifier de manière significative la qualité de vie de l'individu ; certains auront un emploi sans le salaire qui assure sa capacité de payer sans modifier de manière significative la qualité de vie de l'individu ; certains n'auront pas l'emploi projeté et le salaire attendu (ce qui permet d'envisager la nécessité de prolonger des études dans le même domaine ou un autre ; d'autres n'auront pas d'emploi.
La condition sociale des travailleurs (individus) est inégale : certains sont seuls, certains sont en coopération, d'autres supportent (seuls ou en coopération) une famille.

Corollaire :
  • La soumission des droits positifs à leurs coûts est une limitation de ces droits. L'idéologie néolibérale lie cette soumission à l'affirmation de droits négatifs surtout économiques. Cependant, le droit à l'éducation est négatif et positif. Son pan négatif justifie son pan positif. C'est une valeur en soi.
  • Le droit à l'éducation est ambigu car la vocation de l'éducation en démocratie est ambigüe. Il y a confusion (mélange) entre une éducation professionnelle et une éducation civique. Le droit à l'éducation est un droit professionnel et un droit civique.
  • L'éducation civique est nécessairement d'intérêt public, donc ressort de la responsabilité de la société. La démocratisation de cette éducation est nécessaire à la vie de l'idée de démocratie libérale, ou simplement de l'idée d'une société juste. Liée à cela est la vie de l'idée même de Justice.
  • L'éducation professionnelle est plutôt d'intérêt privé, quoique nécessaire à l'intérêt public. Cependant, cette liaison est économique : l'économie publique dépend d'un « détournement » des profits de la vie économique privée ; une partie de l'intérêt privé est sacrifié pour un intérêt public. Ce qui est d'intérêt public est nécessaire à l'équité sociale.
Conclusion :
La hausse des frais de scolarité augmente les dépendances économiques des étudiants, ce qui va à l'encontre de la qualité des études. Cette hausse force l'étudiant à une dépendance économique, une situation de minorité économique. Cibler les étudiants pour porter le fardeau du coût économique des études est une erreur sociale.

La dépendance économique est liée à la dépendance à l'endettement en tant que solution économique.

Nous pouvons faire l'analogie avec une maladie ou une toxicomanie : pour perdurer, elle contamine ses parties saines pour les forcer à contribuer (collaborer) à la situation maladive. Nous avons affaire à un cercle vicieux économique. Ce cercle vicieux a contaminé le politique.

De plus, il est dans l'intérêt public de donner un enseignement professionnel de qualité, qui se vérifie dans la capacité des travailleurs à créer les conditions de leur travail (libre entreprise, innovation). Cette capacité à créer l'emploi est fortement contrainte par les dépendances économiques des nouveaux travailleurs. Cibler les étudiants pour porter le fardeau du coût économique des études professionnelles est une erreur économique.

Solution :
Les étudiants ne devraient pas subventioner leur propre éducation. Ce sont plutôt les travailleurs qui doivent subventionner l'éducation civique et l'éducation professionnelle, dans l'intérêt public. Les travailleurs peuvent subventionner l'entièreté des études si et seulement si les mesures d'imposition sont indexées selon les profits privés.

Ouverture :
Une idée juste du « profit » individuel dépend d'une idée d'une qualité de vie « juste ». La réflexion doit définir et partager cette idée d'une qualité de vie juste, nécessaire pour que les intérêts privés acceptent de sacrifier leur excès par bienveillance.

Notons le manque de compréhension de nos administrateurs, pour ne pas parler de corruption idéologique, par la solution envisagée : cibler une discrimination de la capacité à payer des étudiants. La bienveillance n'est pas valorisée (intégrée) socialement (voir le niveau politique et économique) ; on valorise plutôt l'égoïsme de l'étudiant et du travailleur.

Notons finalement la domination idéologique de la culture de consommation qui définit ses agents par ses dépendances économiques. L'agent économique est conçu comme agent égoïste...


lundi 7 novembre 2011

La mort de la science.

La vérité opératoire ne me suffit pas. Je suis hanté par le spectre de l'absolu et du fondement. La science m'a échappé depuis longtemps. Pourtant, je n'ai pas retourné à la religion de mon enfance. Je suis un peu comme un voyageur perdu, sans boussole ni repère autre que ma pensée, ma conscience, ma méthode. Toutefois, je ne crée rien, n'ouvre aucune voie. Je n'ai que cette passion qui oriente mon esprit et l'empêche de se perdre dans le courant des circonstances. C'est une malédiction d'être improductif et inefficace parmi les hommes.

La vérité scientifique ne se réduira-t-elle nécessairement qu'à la technique? La méthode expérimentale, qu'à des ruses et ingéniosités pour observer, vérifier, contrôler? Que valent des modèles essentiellement inductifs? Peu pour la science, beaucoup pour la pratique. La science est morte lorsque les scientifiques ont abandonné leur prétention à dépasser les apparences pour finalement simplement les décrire, se plongeant dans celles-ci sans réellement questionner l'expérience en elle-même. La science est morte avec la victoire de la convention des apparences sur la vérité, surtout que la convention est malléable et efficace.

Vouloir être philosophe, c'est-à-dire cultiver en soi l'idée du philosophe pour le réaliser, dans un tel monde semble inévitablement voué à l'échec. L'idée du philosophe fait violence à cette parade.

Vous voudrez questionner l'idée du philosophe pour l'intégrer à la fanfare ; parce que vous aimez l'harmonie, vous refuseriez la discordance. Ce jeu de costume a eu lieu souvent dans l'histoire. Ce fut le cas en Grèce au Ve siècle avant notre ère ; ce fut le cas longtemps lors de notre Moyen Âge au sein des Universités et cela persista au sein de cette institution par après ; c'est maintenant encore le cas. Refuser l'idée du philosophe pour le réduire à sa hauteur, c'est tuer la philosophie.

Méfiez-vous de tous les philosophes qui ne violentent pas les ego, plus encore ceux qui les flattent! Et ce ne sont pas seulement les individus qui ont un ego... Tout phénomène social et humain est porteur d'ego. La vraie science tue l'ego... l'ego tue la science.

Vérité ou délire?

Suis-je en train de rêver tout en étant à l'état de veille?
Suis-je soumis à un rêve qui s'impose très fort à mon esprit?
Suis-je en train de délirer?
Ou suis-je en train de saisir une vérité éternelle et nécessaire?
Comment savoir?
Il me faut invoquer l'aiguillon!

vendredi 4 novembre 2011

Essai de méthode spinozienne

« En outre, à partir de ce dernier point, à savoir que l'idée doit être en totale convenance avec son essence formelle, il est clair à nouveau que, pour que notre esprit produise un modèle complet de la Nature, il doit produire toutes ses idées à partir de celle qui présente l'origine et la source de la Nature toute entière, afin que cette idée soit elle-même la source des autres idées. » (Spinoza, Traité de la réforme de l'entendement, § 42.)

Cette idée vraie de la Nature, Anaximandre me semble l'avoir bien saisie. Elle consiste en un processus de détermination partant d'un substrat essentiellement indéterminé, infini et illimité. Ce substrat est donc insaisissable par les sens, mais l'est seulement par l'intellect qui, soit dit en passant, est par essence lui aussi indéterminé, infini et illimité. Il faut seulement éviter de confondre la cause et l'effet en identifiant cette substance à l'intellect, comme une certaine lecture de Platon. Ce serait plutôt le noumène kantien, qui consiste en la réalité « qui est au-delà de l'expérience qui en est faite » (fr.wikipedia.org).

Notre expérience de la Nature est limitée par notre condition d'être naturel, mais elle est aussi la condition de notre connaissance de celle-ci. Au-delà, nous ne pouvons qu'illustrer par la métaphore ou l'analogie. C'est pourquoi l'intellect ou l'âme est au corps ce que l'apeiron est aux éléments : son principe d'indétermination qui l'anime et l'ouvre aux possibles. Nous voyons aussi l'idée du Dao en vertu du Yin et du Yang.

Maintenant, se pose la question de la dissociation : esprit-corps, apeiron-éléments, Dao-Yin*Yang. Cette question est aisément résolue selon l'idée même du processus de détermination. Si les éléments sont une détermination de l'apeiron, comme les forces Yin et Yang une détermination du Dao, alors notre corps est une détermination de notre esprit. Toute détermination est en elle-même une réduction de l'être à des attributs saisissables. Les deux sont fondamentalement unis quoique le premier terme dépasse le second. En d'autres mots, l'unité de la totalité dépasse l'expression de ses attributs ; l'idée de la Nature est puissance (potentiel) alors que la nature saisie est acte.

Toute puissance ou potentiel est indéterminé et se détermine dans l'acte, comme notre identité face l'être que nous sommes présentement. D'ailleurs, la vie en elle-même est le non-vivant en acte (de vie) : le non-vivant est le potentiel infini et indéterminé du vivant qui vit par lui et à travers lui. Elle se définit même en opposition à lui (ou le définit en opposition à elle). C'est qu'elle a une saisie intuitive d'elle-même, de sa valeur, de son existence.

En conclusion, à n'observer que la Nature formelle (en acte), on ne peut saisir l'origine et la source de la Nature toute entière. Ce qu'il faut observer, c'est l'idée de la Nature toute entière représentée dans son origine et sa source. De cette idée vraie, il faut déduire les autres idées afin de saisir l'essence des êtres, donc de faire la science. Si mon idée est vraie (celle que j'emprunte d'Anaximandre), c'est une évidence à mon esprit.

Un doute s'élève dans mon esprit à l'écoute d'un axiome mécaniste : « rien ne se perd, rien ne se crée ; tout se transforme ». Comment concilier la génération par dissociation avec la transformation substantielle?