jeudi 10 novembre 2011

Crise de l'endettement.

Un autre essai d'analyse d'un problème économique plus global : la crise de l'endettement. J'essaie de discuter des arguments qui s'objectent à la pensée d'une économie qui sort de ce cercle vicieux économique.


Définition :
L'endettement est la « création » présente de richesse aux dépends d'une économie future.

Critique :
L'explosion de l'endettement induit une idée fausse de la croissance économique puisqu'il n'y a pas réelle croissance dans le temps : il n'y a aucune croissance de richesse réelle mais plutôt une croissance de richesse fictive, spéculative (possible). Ce n'est pas une solution puisqu'elle n'est que le report du problème vers le futur.

Est-ce le constat de notre incapacité à créer un ordre socio-économique adéquat et juste?

DISCUSSION

Première objection :
L'« absence de solution ». Il n'y aurait aucun autre moyen encore trouvé de maintenir notre manière actuelle de vivre. C'est donc un mal temporaire.

Réponse :
L'argument n'est que l'affirmation d'un défaut de compréhension, d'imagination et de volonté. De fait, un défaut de compréhension implique un défaut de connaissance des causes du problème, et sans cette connaissance, l'action, manifestant une volonté de changer la situation, n'a pas de fondement concret. Nous repoussons donc la prise de solution en reportant le problème.
La réalité, c'est que la situation ne change pas, nous demeurons dans un statut-quo. Le « système » économique en place poursuit sa recherche de cohérence, même si cette cohérence se fonde sur une injustice fondamentale. On devrait parler de « rationalisation » d'une manière psychologique.

Deuxième objection :
L'« impossibilité d'une solution ».

Réponse :
L'argument n'est que l'affirmation d'un défaut de compréhension, d'imagination et de volonté. L'absence de compréhension devient paresse intellectuelle : son fondement est un sophisme de réduction naturaliste. On finit par affirmer que la situation est ce qu'elle doit être, est nécessaire. Le problème n'est plus seulement considéré comme temporaire, mais nécessaire. Elle devient un paradigme économique et politique.

Troisième objection :
Le fardeau économique incombe à l'intérêt privé selon un « choix de valeur » ; le sacrifice témoigne de l'affirmation de la valeur. L'endettement offre la liberté à l'individu d'exprimer économiquement ses valeurs. C'est donc une mesure légitime.

Réponse :
L'endettement est une bonification présente pour un sacrifice futur. Le besoin étant senti comme un mal, on cherche à éviter ce mal au temps présent (chez ceux qui sont en situation difficile, par exemple les étudiants non encore professionnellement autonomes). Pour les étudiants, ils devront sacrifier leur autonomie future par l'endettement, aux premiers temps de leur autonomie économique professionnelle. de manière générale, l'endetté se place en situation de besoin anticipé. Leur qualité de vie dépend alors de l'endettement. L'émancipation de cette condition dépendante nécessite un certain seuil économique qui est espéré. Cependant, le futur échappe à notre prévoyance ; nous sommes laissés à une situation présente constante soumise à la fortune (littéralement), d'où la limite à la spéculation sur notre fortune future. Ceci montre l'insuffisance de l'endettement comme solution rationnelle à des problèmes fondamentaux.

Cependant, c'est de manière bien raisonnable que nous entreprenons de nous endetter, selon l'objection en question. L'endettement raisonnable vise la réalisation de nos valeurs essentielles, dignes du sacrifice futur : une qualité de vie raisonnable.

Malheureusement, l'endettement associe la qualité de vie raisonnable à une qualité de vie excessive puisque ce sera l'excès qui remboursera la dette. Autrement, ce sera un manque à cette qualité de vie raisonnable ; elle devient donc déraisonnable. Nous envisageons alors l'« excès raisonnable », ce qui est contradictoire, l'excès étant déraisonnable. C'est donc un piège moral. Cependant, on y survit par nécessité.

L'« excès raisonnable » nous semble un bien économique, forçant l'intérêt de l'endetté vers la performance économique. Cette performance est habituellement calculée en terme de salaire. Or, ce qui est sacrifié doit être une partie du salaire, celle excédant le minimum requis pour maintenir la « qualité de vie raisonnable ». Nommons cet excès le profit, celle associée à une « qualité de vie excessive ». On parle donc de « plans d'austérité » dans l'optique du sacrifice (idéalement, seulement des excès). Pourtant, ce sacrifice doit être équitable, donc ne pas faire descendre la qualité de vie sous le seul du juste milieu (entre le manque et l'excès). Que sacrifions-nous lorsque nous n'avons pas d'excès?

Ceux qui disposent de cet excès pourront rembourser plus rapidement leurs dettes. Se pose alors la question de l'après-dette. À ce moment, la réalité de l'excès se fait sentir. Cet excès, la société doit le taxer afin de l'investir dans une structure qui assure l'indépendance de la qualité de vie raisonnable à l'endettement. C'est ainsi qu'on peut se sortir socialement de la spirale de l'endettement.

Cependant, des intérêts privés profitent de cet endettement. Prenons à témoin la société de consommation. Disons, de manière plutôt générale, que l'emprunteur se place en situation de dépendance face à l'emprunteur (quoique ce dernier dépend du remboursement). C'est une situation de minorité qui est avantageuse pour les intérêts privés qui profitent de cette situation (les banques). Les intérêts privés finissent par contrer l'émergence de l'autonomie (économique, mais c'est le cas de toute autonomie : voir Kant, Qu'est-ce que les Lumières?) au nom de leur autonomie. C'est un faux libéralisme que ce néolibéralisme.

Conclusion :
Somme toute, le problème se trouve donc dans la dépendance des intérêts à l'excès. Si le manque est clairement perçu comme un mal, l'excès est vu comme un bien. C'est une erreur. L'excès est un bien qui profite d'un mal. Le bien réel se trouve dans le juste milieu de l'intérêt. L'excès doit être réinvesti socialement pour augmenter la qualité de vie générale, créer les conditions d'émancipation des individus formant la société.

La crise de l'endettement vient de la valorisation de l'endettement comme solution présente à un problème présent. Cependant, ce n'est pas une solution puisqu'elle ne règle pas le problème présent, elle le repousse. C'est donc une fausse solution : le problème futur sera réglé en temps et lieu, selon l'endettement qui lui convient. Il n'y a pas réelle économie ; c'est une économie fictive, fausse, imaginative, spéculative.

L'économie réelle progresse plus lentement, quoique sûrement. Néanmoins, elle seule permet un réel progrès. L'obsession du progrès est la cause de toute cette fiction artificielle et spéculative. C'est une idée confuse ayant pris tant de place dans les esprits qu'elle les maintient dans un état de rêve éveillé. La fin du rêve risque de créer beaucoup de douleurs.

Ouverture :
On parle beaucoup de l'endettement comme un investissement, il faudrait donc bien saisir cette idée fondamentale à l'économie et au progrès réel pour nous assurer qu'elle n'est pas pervertie par quelque idéologie économique frauduleuse. Parlons donc d'investissement individuel, et d'investissement social.

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